Le blog de Jacqueline Peker : littérature, homéopathie, animaux, musique

Cher Monsieur Queneau

dcharnay

Je me permets de vous faire savoir que mon ami Dominique Charnay vient de publier un ouvrage qui intéresse votre fonction de Directeur du Comité de lecture, chez Gallimard, pendant presque trente ans.

En fait, il ne parle pas vraiment de vous mais de tous ces « écrivains du dimanche » qui vous envoyaient leurs manuscrits. Votre amour des mots a dû en prendre un sacré coup, mais comment vous remercier de n’avoir jamais mis sur le marché ces médiocrités qui, de nos jours, auraient pu se transformer en Prix Goncourt?

Dominique Charnay ressemble à un chercheur d’or qui protège sa caserne d’Ali-Baba…mais il respecte tout ce qui se rapproche de la littérature, du dessin, du passé. Vous avez beaucoup de chance, cher Monsieur Queneau, car tous les critiques ont parlé de ce livre, et certains bons libraires ont mis en vitrine vos petits chefs d’œuvre qui ont toujours su nous enchanter.

Nous avons là un artisan…qui ne fait rien à la va vite. Il travaille en oubliant le monde qui vibre autour de lui. Toutes ces lettres, sur lesquelles vous vous êtes penché, l’ont nourri pendant des mois. Nous savons enfin que : « n’est pas écrivain qui veut ». Votre intransigeance nous a évité de perdre du temps.

Les comités de lecture existent-ils encore ? Les rentrées littéraires me permettent d’en douter ! Avez-vous été remplacé par un Monsieur Internet qui n’a aucun pouvoir? Tout s’écrit. Tout se publie. Tout inonde la planète en quelques secondes. Je connais bien l’honnêteté littéraire de Dominique Charnay et je pense qu’il a voulu nous prouver que, grâce à vous, cher Monsieur Queneau, nous avons échappé à des milliers de textes malfaisants, agressifs, larmoyants, bêtes et souvent idiots…sans le moindre intérêt pour un vrai lecteur.

Il sait bien que, de nos jours, les « recalés de l’écriture » ont tous les pouvoirs. Alors, il publie ces lettres qui ont plus de quarante ans et sur lesquelles vous vous êtes penché des heures durant. Et, quand il refuse la dictature de l’informatique, il part flâner sur les quais, toujours à la recherche d’un livre qu’il offrira à un ami.

Vous avez beaucoup de chance, cher Monsieur Queneau, Dominique Charnay est une sorte de chercheur respectueux du passé qui ne s’écarte jamais de la vérité.

Il sait que je ne peux pas vivre sans écrire. Je me demande s’il aurait accepté de déposer mes manuscrits sur votre bureau…et d’attendre votre avis.

Dominique Charnay

« Cher Monsieur QUENEAU. Dans l’antichambre des recalés de l’écriture »

Préface de Pierre Bergounioux – Denoël

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